Reflexions

Les défis de l’archipel français pour les agences et les marques

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Alors que les agences, comme les départements marketings, sont peuplés “délites” diplômées, progressistes et cultivées, comment rester connecté à la réalité du monde ? 

Avez-vous lu le best-seller 2019 de Jérôme Fourquet Larchipel français ? Le directeur du département opinion de l’IFOP analyse dans cet ouvrage les mutations qui ont traversé la société française ces quarante dernières années. Il y évoque les multiples fracturations (sociale, éducative, territoriale, ethnique, culturelle) qui ont conduit à l’apparition de nombreux pôles de repli des individus (les « îles » de l’archipel), qui vivent les uns à côté des autres sans jamais se fréquenter. Ce livre, véritable mine d’or de cartes et de données, nous tend un miroir.

Serions-nous, nous agences, une île, et si oui, comment en échapper ?

Il y a peut-être ici quelques personnes pour se souvenir d’un temps où l’on croisait dans les agences – toutes obédiences confondues – des aventuriers sans diplôme, sans cadre mais passionnés. Aujourd’hui, la grande majorité des gens qui y travaillent ont un master, créatifs compris. Si l’on adopte la thèse de Jérôme Fourquet, ce niveau d’études place le « peuple des agences » (l’expression n’est pas de lui) dans l’élite de ceux qu’il nomme les « gagnants/ouverts ». Qu’il décrit comme très diplômés, cultivés, progressistes et – c’est là où le propos devient intéressant – autarciques. Car coupés du monde des « perdants/fermés », sous ou peu diplômés, plus précaires, qui ne profitent pas de la mondialisation et qui rejettent tout ce qui est associé à une perception de domination (médias, classes politiques, etc.).

L’entre-soi crée le risque que soit véritablement oubliée cette audience des « perdants/fermés », alors qu’elle est importante et surtout contributive. Ce risque est accru du fait que les services com’ et marketing des annonceurs abritent exactement la même population socio-culturelle. Selon les hasards de la vie, deux potes de promo se retrouvent souvent sur le même appel d’offre, le premier l’ayant rédigé, le second y répondant… Une autarcie qui prive ces métiers de la fraîcheur qu’offre le mélange des genres et des gens, et d’un accès à une véritable diversité d’opinions.

Pour sortir de cette île, il est possible d’agir et de créer des ponts. Chez Monet + Associés, nous préservons notre implantation délocalisée (à Nantes, Bordeaux et Lyon, en plus de Paris) qui nous relie à des écosystèmes variés. Nous avons également pris une décision stratégique majeure en dotant notre agence d’une cellule dédiée au social listening et au planning stratégique. Ce département a pour vocation d’éclairer et de challenger les actions stratégiques de nos consultants.
L’écoute des conversations spontanées, que nous menons en continu à des fins de segmentation d’audience, d’étude de part de voix, d’UX, d’identification des Key Opinion Leaders, de détection des crises… nous permet de nous rapprocher de la réalité, de comprendre les langues et les cultures en n’oubliant personne.

Le planning stratégique oriente les tactiques. Il nous aide à comprendre les opinions, à identifier les antagonismes, les tendances de fond et les signaux faibles. Des analyses qui nous servent à écrire des récits et des messages plus fins, mieux ajustés, qui influencent les représentations. Et qui n’oublient personne.

C’est bien, mais ce n’est pas suffisant ou disons, ce n’est qu’un début. Pour paraphraser Coluche, “Quand on voit ce qu’on voit et qu’on entend ce qu’on entend, on peut commencer à essayer de mieux penser ce qu’on pense”.

Tribune de Raphaële Blot, Brand Storyteller chez Monet + Associés